lundi 28 décembre 2009

BO DIDDLEY


Biographie :

Ellas Otha Bates McDaniel plus connu sous le nom de Bo Diddley, né à McComb (Mississippi) le 30 décembre 1928 et mort le 2 juin 2008 à Archer en Floride, était un bluesman, guitariste, chanteur et compositeur américain. Il est reconnu comme l'inventeur du diddley beat, forme évoluée et transposée sur la guitare du jungle beat, qui caractérise l'éclosion achevée du Rock en 1955 et de tout ce qui s'en suit.
Son pseudonyme lui vient du nom donné à un instrument rudimentaire, constitué d'un morceau de fil de fer accroché à un mur sur lequel on faisait glisser un goulot de bouteille selon la technique du bottleneck, et qui remplaçait la guitare chez les apprentis musiciens noirs des débuts du blues. Cet instrument, le diddle ou diddley bow est avec le jug (bouteille servant de basse dans laquelle on soufflait) à la base de l'invention des musiques afro-américaines.
Bo Diddley est né dans une famille pauvre du Mississippi alors que sa mère n'avait que 16 ans. Son père mourant peu après sa naissance, il est adopté par une cousine de sa mère qui le lui confie : Gussie McDaniel, seulement âgée de 15 ans mais formant un foyer. Il prendra le nom de McDaniel mais continuera à y accrocher celui de Bates. Des incertitudes existent aussi quant au premier prénom qui lui fut donné, celui de Ellas ou de Otha. Il aura cependant comme nom d'usage : Ellas McDaniel.
La famille McDaniel déménage en 1934 à Chicago dans la banlieue sud réputée comme un quartier difficile. Il y étudie, s'orientant finalement vers la lutherie, y pratique de petits métiers et apprend à se défendre.
En 1952, il acquiert un ampli de guitare d'où il va sortir son premier vrai son saturé allié à une réverbération généreuse. Il bidouillera lui-même l'un des tous premiers effets trémolo/vibrato avec un réveil et quelques pièces de mécanique et il crée alors son premier son spécifique qu'il va toujours plus explorer et élargir.
L'activité musicale étant trop saisonnière pour en vivre, il concède de produire une maquette comportant 2 titres : Uncle John et I'm a man. Rapidement repéré, il signe en 1954 un contrat de sortie pour un disque avec la Chess Records et Uncle John devient Bo Diddley.
Avec son premier single double face comportant Bo Diddley (A) et I'm a Man (B) sorti en 1955, il invente ou révèle au grand public un rythme qui sera abondamment repris dans le monde du blues et du rock. On le nomme jungle beat ou diddley beat. Le disque atteint la seconde place des charts Rhythm'n Blues aux États-Unis.

Si le diddley beat de la chanson Bo Diddley est considéré comme original et singulier, le riff ainsi que les paroles de I'm a Man sont souvent considérés comme inspirés d'une chanson de Muddy Waters, Hoochie Coochie Man écrite par Willie Dixon en janvier 1954. Waters, ami et collègue de Diddley à la Chess Records, lui donnera une réponse en sympathie avec Mannish Boy en 1955 juste après la sortie de son single pour lui signifier qu'il venait d'entrer dans la cour des grands.
Elvis Presley, performant depuis moins d'un an seulement, se montre fan de Bo Diddley et ce dernier attribue le développement des contorsions suggestives et caractéristiques du King, à l'inspiration ou l'audace qu'il a acquise en regardant Bo Diddley sur scène, telle sa prestation au Carnegie Hall de New York cette même année.
Le 20 novembre 1955, il passe au Ed Sullivan Show qu'il rend furieux. Annoncé comme un musicien de Folk et censé jouer sagement un morceau devenu classique de la musique country, Sixteen Tons de Tennessee Ernie Ford, comme il était convenu, il interprétera sans avertir Bo Diddley. Le très respecté Ed Sullivan lui dira qu'il est "l'un des premiers hommes de couleur à l'avoir jamais trahi (doublé)". Face à cette expression ressentie comme raciste et autoritaire (castratrice), Bo Diddley avouera s'être retenu de lui casser la figure. Suite à cet évènement, il sera empêché de pratiquer plusieurs autres shows et Ed Sullivan lui dira que sa carrière serait finie avant 6 mois. Cependant, Bo Diddley venait de lancer son premier tube sur les ondes et en kiosque tout en ayant tenu tête au système médiatique alors soumis à la ségrégation et au conservatisme.
En 1956 il fait la connaissance de celle qui deviendra en 1957 Lady Bo, Peggy Jones, la toute première guitariste de Rock, toujours active et dont il affirme qu'elle est la seule à connaitre les voies de l'origine. Parmi les femmes qui l'ont accompagné se trouve aussi celle qu'il a surnommée la Duchesse, the Duchess (1962-1966), Norma-Jean Wofford. Elle permit la transition durant l'envol en solo de Lady Bo avec son propre groupe (Lady Bo & The Family Jewel) et Bo avait fait passer la Duchesse pour une demie-sœur uniquement pour alimenter la curiosité de ceux qui osaient demander où avait pu passer Lady Bo. Il avait appris la guitare à la Duchesse et elle était entourée de deux autres choristes : Gloria Morgan et Lily "Bee Bee" Jamieson, dont le trio en compagnie de Diddley est connu sous le nom de Bo-ettes. Elle quitta à son tour le groupe pour fonder sa famille, puis il y eut notamment Cornelia Redmond surnommée Cookie ainsi que Debby Hastings.

Il écrit en 1957 sous le pseudonyme de sa femme d'alors, Ethel Mae Smith, le titre Love is Strange pour le duo Mickey et Sylvia (Mickey Baker et Sylvia Robinson, créatrice de Sugar Hill Records) qui en font l'un des plus grands classiques du Rhythm and Blues. Il sera repris par Buddy Holly, les Everly Brothers, Sonny and Cher, Paul Mac Cartney, Everything But the Girl, etc., ainsi que dans le film Dirty Dancing.
Il influencera plusieurs groupes des sixties : The Rolling Stones, The Yardbirds, The Strangeloves, The Pretty Things, The Animals, Led Zeppelin, The Shadows of Knight, The Kinks, The 13th Floor Elevators, The Kingsmen, The Who, The Them et la scène rock'n'roll en général (selon l'expression des Animals dans leur reprise en 1964 de The Story of Bo Diddley qu'ils réarrangent et développent).
Les Moody Blues eux-mêmes lui consacreront des prestations live remplies d'admiration et d'énergie. Parmi ses fans et pairs ayant fait des reprises sans jamais payer de droit durant des concerts, sous couvert de bienveillance honorifique tel des medleys, on compte aussi Janis Joplin et Jimmy Hendrix.
Dans les années 1960, il produit beaucoup de morceaux dont certains sont accompagnés de paroles parlées à l'instar de son hit Say Man (1958), sur un mode cependant différent de celui de John Lee Hooker, qui sont les pales prémisses du Rap et du Slam mais en tout cas un signe de liberté musicale et de recherche de mode d'expression qui deviendront chères à Frank Zappa à la fin des années 1960. Sur certaines chansons primordiales comme Who do you love (1956) et I'm a man (1955) il adopte et développe cependant le style chanté de Hooker.
Il passe haut la main la fameuse épreuve du train relative aux bluesmen qui est d'imiter le train avec la guitare avec le morceau Please Mister Engineer (1961) où il réaffirme le son saturé et son importance, ainsi que sa toute simplicité (toujours très relative avec Bo Diddley). Il n'utilise pas le diddley beat à proprement parler sur cette chanson. Bo Diddley pense par ailleurs qu'avec son diddley beat il a trouvé « le son d'un train de marchandises » . Il n'y a aussi qu'un pas à croire que le diddley beat serait la 30ème chanson perdue de Robert Johnson, relatée dans ce même film, selon la légende du pacte à la croisée des chemins (Robert Johnson, Cross Road Blues, 1936). Le Diable enlèverait les âmes contractantes à l'age de 27 ans (Jimi Hendrix, Brian Jones, Janis Joplin, Jim Morrison, Robert Johnson...) mais ne put rien contre Bo Diddley qui à 27 ans (1955) lutte a contrario contre toute signature contraignante et toute soumission au système : à la Bête, qui le renvoie et cherche à l'écarter (Ed Sullivan). Pour illustration de ce lien logique légendaire, Eric Clapton reprendra le morceau Cross Road Blues de Johnson, certainement de manière intuitive et spontanée, avec son groupe Cream en 1968 puis durant sa carrière solo, en retrouvant de plus en plus le diddley beat primordial qui animait leur version. Robert Johnson et Bo Diddley semblent liés par la légende du Blues, l'un ayant flirté avec l'image du Diable, l'autre n'ayant jamais cru en lui, mais ils auraient pourtant rassemblé à tous les deux le registre entier du Rock ou qui le permet.
Les Rolling Stones débutent leur carrière en tournant avec Bo Diddley en 1964. Ils lui voueront une admiration toujours renouvelée et feront plusieurs reprises en s'en inspirant régulièrement. Ils l'inviteront par la suite dans plusieurs de leurs concerts pour jouer avec eux.
Avec le morceau Bodiddley-itis enregistré la décennie suivante (1972), il compte démontrer aux mauvaises langues - intriguées par la qualité peaufinée que prennent ses albums à la fin des années 1960 - qu'il maitrise en effet toujours la scène et qu'il faut même se passer des studios pour n'avoir qu'à jouer et performer. Il y exécute de remarquables sauts et contorsions (la guitare entre les jambes) toujours avec son célèbre jeu de jambes, et avait fortement influencé Pete Townshend des Who (dont beaucoup de morceaux sont des diddley beats comme Magic Bus de 1968). Pete Townshend étant finalement devenu le maitre médiatique de la hard-attitude et des sauts avec guitare (bien au-delà des Led Zeppelin), Bo Diddley renchérira sur le même morceau live (Bo Diddley at his Best) en imitant jusqu'au saut spécifique de Pete.

Discographie :

Bo Diddley (1958)
Go Bo Diddley (1959)
Have Guitar-Will Travel (1960)
Bo Diddley In The Spotlight (1960)
Bo Diddley Is A Gunslinger (1960)
Bo Diddley Is A Lover (1961)
Bo Diddley's A Twister (1962)
Bo Diddley (1962)
Bo Diddley & Company (1962)
Surfin' with Bo Diddley (1963)
Bo Diddley's Beach Party (1963)
Bo Diddley's 16 All-Time Greatest Hits (1964)
Two Great Guitars (avec Chuck Berry) (1964)
Hey Good Lookin' (1965)
500% More Man (1965)
The Originator (1966)
Super Blues (avec Muddy Waters & Little Walter) (1967)
Super Super Blues Band (avec Muddy Waters & Howlin' Wolf) (1967)
The Black Gladiator (1970)
Another Dimension (1971)
Where It All Began (1972)
Got My Own Bag of Tricks (1972)
The London Bo Diddley Sessions (1973)
Big Bad Bo (1974)
20th Anniversary of Rock & Roll (1976)
I'm A Man (1977)
Ain't It Good To Be Free (1983)
Bo Diddley - His Greatest Sides - Volume 1 (1984)
Bo Diddley & Co - Live (1985)
Hey...Bo Diddley in Concert (1986)
Breakin' Through The BS (1989)
Living Legend (1989)
Rare & Well Done (1991)
Live At The Ritz (avec Ron Wood) (1992)
This Should Not Be (1992)
Promises (1994)
The Mighty Bo Diddley (1995)
A Man Amongst Men (1996)
Moochas Gracias (avec Anna Moo) (2002)