Les petits bonheurs
— S’il
y a des bonheurs dans ta maison !…
Mais, petit malheureux,
Elle en est pleine à faire sauter les portes et les
fenêtres !…
— Moi,
d’abord, ton serviteur,
Le
Bonheur de se bien porter.
Je ne suis pas le plus joli, mais le plus sérieux.
Tu me reconnaîtras ?
— Voici
le Bonheur de l’air pur
Qui est à peu près transparent.
— Voici
le Bonheur d’aimer ses parents,
Qui est vêtu de gris, et toujours un peu triste,
Parce qu’on ne le regarde jamais…
— Voici
le Bonheur du ciel bleu
Qui est naturellement vêtu de bleu,
Et
le Bonheur de la forêt
Qui, non moins naturellement, est habillé de vert.
— Et
puis, quand vient le soir,
Voici
le Bonheur des couchers de soleil,
Qui est plus beau que tous les rois du monde,
Et
qui suit le Bonheur de voir se lever
les étoiles,
Doré comme un dieu d’autrefois…
— Puis,
quand il fait mauvais,
Voici
le Bonheur de la pluie,
qui est couvert de perles,
Et
le Bonheur du feu d’hiver,
Qui ouvre aux mains gelées son beau manteau de pourpre…
— Et
puis encore…
Mais vraiment, ils sont trop… Nous n’en finirions
pas !
(Maurice Maeterlinck)