Ô nostalgie des
lieux
Ô nostalgie des lieux qui n’étaient point
Assez aimés à l’heure passagère,
Que je voudrais leur rendre de loin
Le geste oublié, l’action supplémentaire !
Revenir sur mes pas, refaire doucement
— et cette fois, seul — tel voyage,
Rester à la fontaine davantage,
Toucher cet arbre, caresser ce banc…
Monter à la chapelle solitaire
Que tout le monde dit sans intérêt ;
Pousser la grille de ce cimetière,
Se taire avec lui qui tant se tait.
Car n’est-ce pas le temps où il importe
De prendre un contact subtil et pieux ?
Tel était fort, c’est que la terre est forte ;
Et telle se plaint : c’est qu’on la connaît peu.
(Rainer Maria Rilke)
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